mercredi 29 juillet 2009

Ville et campagne ─ simulation et simulacre

Les barbecues au B. me manquent, et je repense à ce que te disais A. sur Paris, la ville qui étouffe.

Ce qui manque le plus, en ville, mais cela vient peut-être du fait de ne connaître personne, est le manque de réel sans cesse présent en dehors du vide et de l’angoisse, rarement absents.

La nature crée un sentiment du réel, qui peut amener des gens ne se connaissant pas à une relation « vraie » sans plus de détour, juste comme ça, suivant ce qui se donne.

A la ville au contraire mille détours, et on met les masques en premier et l’on ne sait pas s’en débarrasser, la convenance prend ainsi plus de place qu’il n’en paraissait.

C’est qu’en ville il faut se tenir. Ce n’est que ça, la ville. Parfois même le sentiment que toute conduite en relève, même un bourrage de gueule. Une sorte de film dont ‘‘vous êtes le héros’’. Les vertiges citadins sont ainsi très fréquents.

Ne plus arriver à se présenter, en ville, ou à tenir debout, sont des maux impérieux. A la campagne c’en sont d’autres, comme un réel qui engloutirait, sorte de sable mouvant, ou bien des moments vécus qui vont trop loin, emmenés par le contexte (des violences, des horreurs, rien n’y est impossible) sur ce chapitre la violence citadine se dit chez Haneke : tirer sur les gens pour rien, bombes qui explosent, ou simples tromperies dues à une perversité de l’image de soi.

Un relent de faux et de redoublé pèse sur la ville. L. était citadine, jouant à merveille me semblait-il sans cesse des miroirs, des symboles, des coïncidences, dans une séduction, dans une danse, perpétuelle. Jusqu’à ce que le spectacle soit fini, qu’il s’épuise ou se troue. C’est le spectacle qui tient lieu de réel, en ville. On souhaite un bon spectacle.

Les poètes écrivent à la campagne mais la culture, toujours dans la perspective de l’industrie qui en porte le nom, naît en ville. La campagne produit, demande, recèle, un autre réel, qui est de participation et de vérité : vérité des liens, des mots, des actes. Il n’y a pas de spectacle veut dire ici : pas de miroirs, d’enseignes publicitaires qui font signes, de lampadaires qui organisent l’éclairage artificiel, de nouveaux vêtements pour se donner un nouveau rôle.

Le ‘‘spectacle’’ à la campagne est sans médiation spéculaire. Participation, c'est-à-dire : ‘‘spectacle’’ des éléments mis en jeu seul. Je mets des guillemets car c’est un spectacle, mais pour nul spectateur, d’ailleurs il n’y en a pas (à moins que des participants restent en retrait, comme en ville on peut n’être, ne se sentir, que figurant) ; et ce n’est pas vécu comme spectacle.

En ville des médiations et des interactions, une société. A la campagne des instruments et des actions de groupe, une communauté.

En ville on met des miroirs, des signes et des lampes, et une simulation prend scène. A la campagne on allume un jeu, on sort à manger, à boire, ou tout autre instrument, et un simulacre prend vie.

A la frontière des villes comme au cœur des bourgs, cela peut parfois s’inverser.

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