jeudi 20 août 2009

Aujourd'hui, Hadopi enlève le haut (sa version US)

Un américain va se retrouver à payer 675 000 dollars, qui risquait d'en payer 4,5 millions, pour avoir télécharger de la musique illégalement. Enormément de morceaux, à vrai dire, la discothèque du monde dans son ensemble : 30 titres ! Un mois plus, c'est 1,92 millions de dollars qu'une américaine du verser pour... 24 morceaux ! L'article (lemonde.fr) ne dit pas quels étaient les morceaux téléchargés.


C'est tout de même extraordinaire. Je crois qu'on peut difficilement faire plus rentable. On a là la collusion extrême entre ceux qui apportent les capitaux dans l'industrie (les capitalistes), les pouvoirs publics (qui financent tout le dispositif de suivi et de poursuites) et le système judiciaire. La situation est celle-ci : comme dans d'autres domaines, et autrement (par exemple les subventions aux agriculteurs), l'Etat soutient les capitalistes en leur assurant des revenus supérieurs à ceux du marché.


L'astuce est de prendre les artistes comme bouclier, puisque dans l'idéologie de la loi ce sont surtout eux qui sont censés bénéficier des peines. Le citoyen, jugé délinquant, ou avec ces sommes-là je crois qu'on peut dire criminel, est la souce de ces revenus inespérés. Quand on sait les avantages, en termes de diffusion, de notoriété et d'image, que procurent les téléchargements dits illégaux, c'est-à-dire en dehors de revenus directs, sonnants et trébuchants, par le biais des seuls dispositifs mis en place par les producteurs et diffuseurs, on se dit que c'est vraiment cher payé. L'enjeu n'est donc pas là : comment se fait-il donc que personne ne s'étonne de telles sommes ?


C'est que c'est le système libéral lui-même qui se met en scène, et sur une scène victimaire, la création en signe identitaire, et ceux qui "bénéficient" de ces créations en bouc-émissaires/bourreaux. Je mets des guillemets parce que bénéficier de créations dans le système libéral, ce n'est pas du tout, par exemple, les comprendre, en puiser la sève, s'en servir pour d'autres créations : non non, c'est tout simplement les user, les consommer.


Toute l'idéologie de la loi Hadopi telle qu'elle nous a été présentée, et les conséquences pratiques de la loi équivalente aux Etats-Unis, est biaisée. Puisqu'elle se garde bien de dire tout ceci à propos du système libéral-capitaliste. A la place, elle dit : les artistes sont floués.


Soit. Si c'était vraiment le cas, il serait bien plus juste, dans une société soucieuse de... la société justement, de son ensemble, du bien commun, et non des intérêts de particuliers (surtout de ceux, à vrai dire, qui amènent les capitaux industriels : ceux pour qui un disque ou un morceau de musique n'est pas une création, voyez-vous, mais un produit), de procéder au paiement d'une dette, puisque c'est l'idée de fond exprimée par l'idéologie que le téléchargeur contracte une dette auprès des artistes, par le biais d'un dispositif sociétal (comme la justice).


Un artiste ne doit pas toucher 10% sur le prix d'un disque, donc pourquoi ne pas réclamer la somme du prix du marché au téléchargeur, à payer directement à l'artiste ? Toute cette loi repose uniquement sur du symbolique, donc pourquoi ne pas répondre par du symbolique ? En dehors de cela le système libéral capitaliste se met à nu, en nous vendant des idéologies grossières (l'idéologie devenant : histoire mythique servant les intérêts d'un groupe particulier en opposition à d'autres groupes qui doivent croire et accepter cette histoire).


"A l'audience, lorsqu'on lui a demandé s'il regrettait d'avoir téléchargé de la musique illégalement, Joel Tenenbaum avait refusé de répondre, jugeant la question "biaisée". "Je ne regrette pas d'avoir bu de l'alcool alors que je n'avais pas l'âge légal quand j'étais à la fac, même si je me suis fait attraper plusieurs fois", a-t-il ajouté." (article du monde.fr)


Je trouve sa réponse biaisée à son tour, d'autant qu'il se place dans un contexte (l'alcool) déjà stigmatisé comme délinquant. Mais c'est l'être aussi, dans ce monde, que de remettre en cause les idéologies des groupes dominants, et surtout de cet ordre qui se sert de la création pour non seulement justifier une industrie, mais en plus engranger, avec la bénédiction des pouvoirs publics (exécutif, législatif et judiaiciaire, toujours main dans la main sur les questions de fond), des bénéfices supérieurs à ceux du marché, donc en plus dans une délinquance masquée à l'égard de leur fonctionnement avoué.


Il faudrait proposer une autre "idéologie", d'autres histoires en tous les cas, et d'autres lois. Et comment compter sur une opposition qui n'en a même pas conscience, qui croyant encore devoir faire dans la critique ne se tourne pas vers l'innovation, la création, l'élaboration, d'un autre monde, mais se torture à tour à tour croire et ne pas croire dans les idéologies qui nous sont servies, en se posant de simples questions morales à leur sujet ainsi que des prêtres, en ne voyant pas plus loin qu'un vague ajustement des dispositifs et des mythes existants ?


Comment ne pas inciter à la délinquance avec des pratiques délinquantes aussi ouvertement monstrueuses ?

samedi 15 août 2009

Grippe A et ethnologie


Je ne peux m'empêcher de mettre en lien cette possible dévastation avec des projets comme celui du Branly, qui consistent en l'expansion acritique de l'effort de guerre occidental moderne.

La constitution des premiers musées d'ethnologie n'est pas étrangère au projet colonial. De l'un à l'autre, ce n'est que l'évolution de cette "civilisation" qui se laisse lire, dans ses tendances autoréférentielle et expansionniste-globalisante.

Où l'abord des marges externes réelles est stratégie pour les transformer en marges internes imaginaires.
 
compteur pour blog